Bien des poèmes sont inachevés.
La sincérité n’est pas gage de poésie,
mais quand même
Un ou deux vers suffisent pour gagner
sa journée.
Mais le poème est long.
On suppose qu’il déborde de la vie.
Quelqu’un le coupera.
Littérature, écriture
Bien des poèmes sont inachevés.
La sincérité n’est pas gage de poésie,
mais quand même
Un ou deux vers suffisent pour gagner
sa journée.
Mais le poème est long.
On suppose qu’il déborde de la vie.
Quelqu’un le coupera.
Nous sommes de passage,
À quoi bon s’alléger, ou se lourdir ?
Se glisser entre les mots,
Mille sphères, volumes sans poids, jusqu’à.
Et tous ces êtres chers.
Nous sommes être parmi des êtres, fils de relation.
Quoi se glisserait entre nous ?
Paysage familier de gare ce matin encor.
On croit se rendre au même endroit,
mais d’autres sont déjà loin et haut.
La jeune fille dans le train, en face de moi, à quelques sièges du mien, se tient penchée
Dos penché visage penché, elle
regarde loin.
Elle sourit. Puis se sentirait nostalgique et quittant sa posture penchée
l’inquiétude a envahi son visage elle se mord les lèvres, et regarde entre ses mains avec sérieux.
Et moi ? Et moi je suis assis dans le train de ligne C, qui me conduit au travail. À quelle endroit se situe-t-elle dans ma paume de main, cette ligne ?
J’ai laissé mon fils à l’école ce matin et je le retrouverai ce soir.
Nous sommes le lundi un 7 novembre.
Et le paysage est lui aussi traversé de lignes fermées, qui traversent la lumière, qui la transportent, d’un point vers l’autre.
Elle ne lève plus les yeux. Notre train dépasse un autre train .
Les nuages ne disent rien, sinon le temps qu’il fait, mais les yeux restent ouverts.
Rien,
Être à sa place ;
Et elle semble une juste place.
Ni le soleil ni les nuages tremblent.
Ils vibrent. Ils ne tremblent
pas. Rien,
mais Rien de plus
pourrait être la lumière
d’une flamme qui danse.
Te crois-tu au bout,
Mais il reste la rose rouge
Parfois juste la page suffit. Son contact de chair ou plus exactement sa présence. RIen ne pourrait être ajouté. Ou peut-être l’évocation de sa présence à l’orée du sommeil. Comme une page ouverte et blanche. On vous pencherait. On vous penserait riche. C’est le signe de la félicité.
Rendre son temps plus excitant.
Ici, ce sont les (lents) nuages qui passent devant ma fenêtre.
Je cherche ailleurs :
Accompagner (ce matin) mon fils à l’école.
Je cherche encore :
Allumer une (belle) lampe.
Je cherche en plus :
Voici donc – toute ma richesse !
Je ne pourrai vous rendre la monnaie,
mais un ou des rêves.
L’effroi survient quand j’ouvre les yeux. Non la paupière, les yeux. Je suis dans le métro, dans le wagon, dans la rame. Ne devrais-je pas dire l’arame ? Je suis dans l’arame tandis qu’une voix enregistrée débite des noms de stations qui me font croire que je suis dans la rame. Mais quand je suis dans l’arame, je découvre être parmi des hommes qui comme moi se dirigent vers une station inconnue, parfaitement sue. C’est un cauchemar. Car je découvre alors être entouré d’hommes. Pas un mot. Croisons les doigts. Qu’ils n’aient pas vu que j’ai vu. Est-ce contagieux ? J’ose à peine regarder mon reflet, mais je sens bien qu’un autre sommeille en lui, que dis-je qu’il regarde lui-aussi le monde d’un oeil morne, triste et froid. Que son épiderme laisserait paraître une cuticule épaisse, reptilienne. Qu’il vous croquerait le portrait avant de l’avoir esquissé. Ah damned ! Un lac, vite un lac ; d’un ample pas souple, que je puisse rejoindre les miens.
Toujours là, à portée de doigts, à portée de main. D’autres partent ce soir. Pas moi. Pas moi encore. Allongé je ferme les yeux. Je pense à la parenthèse du jour, au point du sommeil, au paragraphe du rêve. Espace blanc et reste une promesse. Certaines mémoires proches arrivent déjà au seuil de l’existant. La vie les emporte presque au bout. Le soleil se fait tard. Nous chercheront-elles une fois parties ? nous retrouveront-elles ? Et de quelles manières ? D’autres ont quitté sans laisser de trace ni d’adresse. Mais il vient parfois quand même un enfant qui vient poser sur leur tombe une fleur. Dans le cimetière, le tulipier de Virginie délivre ses feuilles d’or à qui veut les voir ou les entendre. Que restera-t-il de tout ça ? Peut-être un poème.
Je n’ai pas vu le paysage, à présent qu’il me regarde.
Les trois oiseaux m’ont fixé, derrière les lignes du ciel
À présent que je vois la Seine
Cette part de moi-même – sauvage.
Tant de distractions que
l’essentiel viendrait après, après
la bataille ;
À l’instant de la lente allure, qui fixe l’arrivée à quai,
L’arrivée, l’arrêt.
© 2024 Raphaël Dormoy
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