C’est peut-être ça vivre : tenter de préserver une parcelle. Une parcelle de bleu, ou de blanc. Une parcelle de nuages ou de matière. Une parcelle. Mais une parcelle. Enfant, on imagine cette étendue presque infinie, et le seul fait de la voir, ou de l’aimer, suffit. Mais un jour, on se rend compte qu’il est trop tard. À n’y faire attention pas du tout, cette parcelle autrefois sans autre horizon que la ligne du désir, est un morceau de miettes dans vos mains. Et alors, on se rend compte que maintenir ne serait-ce qu’un ilôt de cette parcelle dans le vacarme du monde peut être le but ultime, le principe supérieur, qui conduirait toute l’action d’un quotidien voué à disparaître. Qu’on pourrait se retrouver très vite sans rien. Démuni, dénudé, sans le principe vital qui fait ressort, que les boulangers appellent leur levure. Ah, le monde frappe à notre porte à chaque instant. Et tant sont nombreuses ses perspectives de nous suffire, de nous pénétrer. Derrière ces prospectus, ces images, ces enveloppes, il suffit de les ouvrir, de les déchirer pour entendre le supplice des uns, le hurlement des autres, aime-moi, aide-moi, voire l’irrépudiable désir de prendre votre peau, d’étouffer votre rien comme le soleil qui darde ses rayons sur votre visage. Quelle parcelle de monde vaut le dénuement et le silence ? Quel fou espère quand plus rien n’est. Mais c’est cela, maintenir cette parcelle, cette parcelle de vie faite du haut silence.
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